L’Entrée de la Mère de Dieu au Temple (21 novembre- 4 décembre) est la dernière des douze principales grandes fêtes de l’Église Orthodoxe. Et elle est la 2nde dans l’ordre du calendrier des 5 grandes fêtes dédiées à la Très Sainte Mère de Dieu et toujours Vierge Marie.

Les descriptions de cet événement se trouvent dans des sources écrites telles que le « Protévangile de Jacques » (chap. 7-8), « Évangile de Pseudo-Matthieu » (chap. 4-7). Ces textes apocryphes reflètent la tradition orale de l’Église racontant la naissance et l’enfance de la Bienheureuse Vierge Marie. (on dit bien l’Entrée et non pas la présentation, en effet, la « présentation » ne concernait que les enfants mâles, et les premiers-nés des mâles.)

Que raconte cet événement de l’entrée de la Mère de Dieu au Temple

Comme toutes les grandes fêtes, l’Entrée dans l’Église de la Très Sainte Mère de Dieu est l’une des étapes sur le chemin de la construction de la Maison de Dieu.

Cette fête rappelle comment Joachim et Anne conduisent dignement leur fille Marie, enfant toute-pure et bénie, au temple du Seigneur, dans l’honneur et dans la gloire par les hommes et par les anges. De leurs voix célestes, les anges chantaient à la jeune fille les paroles du kondakion : « La Vierge, temple très pur du Sauveur, la très précieuse chambre nuptiale, /trésor sacré de la gloire de Dieu, est conduite aujourd’hui dans la maison du Seigneur, introduisant la grâce de l’Esprit divin ; aussi les anges de Dieu proclament :

« Voici le tabernacle céleste ».

Entrée de La Mère de Dieu au Temple- Novgorod 14 -ème siècle
Entrée de La Mère de Dieu au Temple- Novgorod 14 -ème siècle

On considère que l’événement de l’Entrée dans l’Église de la Très Sainte Mère de Dieu est comme un symbole, un présage, une allusion divine au grand événement à venir de La Nativité du Christ. Cette fête vient tout de suite après l’entrée dans l’Avent ou carême de La Nativité.

La fête d’aujourd’hui glorifie la Vierge toute-bénie appelée à devenir la Mère de Dieu, l’Arche vivante de Dieu.

C’est une fête historique, biblique. Elle relate un événement capital pour l’histoire du Salut.  Marie La Vierge est introduite dans le Temple de Jérusalem selon le vœux de ses parents, les justes Joachim et Anne. Elle est le fruit d’une foi sincère et ardente en Dieu, le fruit de la prière et de l’humilité. C’est Elle qui deviendra la seule digne d’être appelée « le Tabernacle sans souillure de Dieu Tout-Puissant ». La fête de l’entrée dans le Temple de la Très Sainte Mère de Dieu est une préfiguration de la faveur de Dieu envers le genre humain, une prédication du salut, une promesse de la venue du Christ. En effet, par elle, le Sauveur de la race humaine s’incarnera sur Terre.

Iconographie orthodoxe de l’Entrée de la Très Sainte Mère de Dieu au temple

Entrée de Marie au Temple- Monastère de Daphni
Entrée de Marie au Temple- Monastère de Daphni

 Les icônes orthodoxes de la Présentation de la Bienheureuse Vierge Marie au temple rappellent toutes cet événement.

Cette icône est proche dans sa composition de celle de la fête de La Sainte Rencontre, présentation du Christ au Temple où le vieillard Syméon reçoit dans ses bras l’enfant Jésus il reconnaît en lui le Messie, le Christ Sauveur. Et, De son cœur, s’élève alors une prière de louange, appelée cantique de Syméon.

Au centre et en bas de la composition

La Mère de Dieu se tient debout, elle a 3 ans selon la Tradition. Ainsi, conformément au contexte historique, elle est représentée sous l’image d’une enfant, on le voit par sa petite taille par rapport à celle des adultes. Or, l’expression du visage de la Vierge Marie est plutôt caractéristique des adultes. Ceci afin d’indiquer la conscience de la Vierge de cet événement, son libre consentement à se consacrer au service de Dieu. Ses mains tendues vers le grand prêtre Zacharie montre sa joie d’aller à sa rencontre et d’entrer dans le Temple sans un regard en arrière vers le monde.

Le Grand Prêtre Zacharie, père de Jean-Baptiste, se tient généralement incliné et tendant les mains vers l’enfant qui s’approche de lui. Il montre une attitude de grande dévotion envers Elle. En effet, inspiré par l’Esprit Saint Zacharie la bénit, en disant : « Le Seigneur a glorifié ton nom dans toutes les générations. C’est en toi qu’aux derniers jours se manifestera la Rédemption qu’il a préparée pour son peuple. ». Le grand prêtre, après la rencontre avec la Vierge Marie, l’ a conduit dans le Saint des Saints. C’est une salle spéciale du temple, où, le rituel de l’Ancien Testament interdisait strictement l’entrée, non seulement aux épouses, mais aussi aux prêtres ordinaires  : seul le grand prêtre lui-même pouvait y entrer, et encore seulement un jour par an.

Au bas de l’icône de l’Entrée de la  Mère de Dieu au temple

Derrière la Vierge, se tiennent ses parents, les justes Joachim et Anne, et derrière eux nous voyons les vierges pieuses avec des bougies allumées à la main. Joachim et Anne selon leur vœux la confient au grand prêtre. Ce qui veut dire qu’ils la confient à la protection particulière de Dieu. Du temps de leur stérilité, Joachim et Anne avaient promis à Dieu de Lui consacrer l’enfant qui allait naître.

 Dans la partie supérieure de l’icône de l’Entrée de la Théotokos au temple

Dans l’iconographie, la protection de Dieu se révèle souvent  par des couvertures rouges. Ces voiles rouges tendus entre les bâtiments pointent vers la Jérusalem d’en haut.

Sur les icônes de l’Entrée de la Très Sainte Mère et toujours Vierge Marie au temple, dans la partie supérieure de l’icône, on la voit assise sur le Saint des Saints. C’est là ou Zacharie l’a introduite. Un ange se tient à côté d’elle. L’ange lui apporte de la nourriture céleste durant les neuf années qu’elle passa dans le sanctuaire. Elle était en prière, dans une rencontre quotidienne avec Dieu. Le fait que la Mère de Dieu soit au sommet de la composition indique également sa haute dignité spirituelle et morale. En effet, Marie portera le Dieu- Homme dans son sein, Elle est un temple plus sacré que le sanctuaire de Jérusalem. Elle est le temple du Dieu vivant.

Homélie de L’Entrée de la Mère de Dieu au Temple- (21 Novembre calendrier grégorien- 4 décembre calendrier julien)

Protopresbytre Alexander Schmemann- [Extrait de, « Celebration of Faith » Sermons, Vol. 3, « The Virgin Mary, » par feu le protopresbytre Alexander Schmemann, 1995.]

On a l’impression que ça remonte à des milliers d’années d’ici, et pourtant, il n’y a pas si longtemps que ça, la vie était marquée par les fêtes religieuses. Bien que tout le monde allait à l’église, tout le monde ne savait pas, bien sûr, la signification exacte de chaque célébration. Pour beaucoup, et peut-être pour la majorité, la fête c’était avant tout une opportunité pour dormir plus longtemps le matin, pour bien manger, bien boire et se détendre. Et malgré cela, je pense que chaque personne ressentait, même si pas de manière pleinement consciente, que quelque chose de transcendant et de radieux faisait irruption dans la vie à l’occasion de chaque fête, amenant une rencontre avec un monde de réalités différentes, un rappel de quelque chose d’oublié, de quelque chose de recouvert par la routine, la vacuité et la lassitude de la vie quotidienne.

Considérez les noms mêmes des fêtes : Entrée dans le Temple, Nativité, Épiphanie, Présentation, Transfiguration. Rien que ces mots, dans leur solennité, avec leur absence de relation à la vie quotidienne et leur beauté mystérieuse, réveillaient quelque souvenir oublié, invitaient, pointaient vers quelque chose. La fête était une sorte de soupir d’aspiration après une beauté perdue mais attirante, une aspiration après quel qu’autre manière de vivre.

Cependant, notre monde moderne est devenu monotone et sans fêtes. Même nos fêtes séculières sont incapables de cacher ce tas de cendres et de désespoir qui s’est installé, car l’essence de la célébration y manque, cette expérience de se retrouver emporté dans une autre réalité, dans un monde de beauté spirituelle et de lumière. Néanmoins si cette réalité n’existe pas, s’il n’y a fondamentalement rien à célébrer, alors aucune méthode de création artificielle d’enthousiasme ne sera capable de créer une fête.

Ici, nous avons la fête de l’Entrée de la Mère de Dieu au Temple.

Son sujet est très simple : une petite fille est amenée par ses parents dans le Temple à Jérusalem. Il n’y a rien de particulièrement remarquable en tout cela, puisqu’à l’époque, c’était une coutume acceptée en général et nombre de parents amenaient leurs enfants dans le Temple, comme une sorte de signe pour les amener au contact avec Dieu, pour donner à leur vie le but et la signification ultimes, pour les illuminer de l’intérieur par la lumière de la grande expérience. Mais en cette occasion, comme l’office du jour le rappelle, ils avaient amené l’enfant au « Saint des Saints », l’endroit où nul, si ce n’étaient les prêtres, n’était autorisé à aller, le centre mystique, le sanctum du Temple. Le prénom de la fille est Marie. Elle est la future mère de Jésus-Christ, celle par qui, comme le croient les Chrétiens, Dieu Lui-même est venu dans le monde Se joindre à la race humaine, pour partager sa vie et révéler son contenu divin. Est-ce que ce ne sont que de belles histoires, des contes de fées ? Ou est-ce que quelque chose nous est donné et dévoilé ici, quelque chose de

directement en relation avec notre vie, qui, peut-être, ne sait pas être exprimé dans le langage humain de tous les jours ?

Ici se trouvait ce Temple magnifique, massif, solennel, la gloire de Jérusalem. Et des siècles durant, il n’y avait que là, derrière ces puissantes murailles, qu’une personne pouvait entrer en contact avec Dieu. Et à présent, cependant, le prêtre prend Marie par la main, l’introduit dans la partie la plus sacrée du Temple, et nous chantons que « Le Temple très pur du Sauveur est introduit dans le temple du Seigneur. » Par la suite, dans les Évangiles, le Christ a dit « détruisez ce temple, et Je le relèverai en 3 jours, » mais comme le précisait l’Évangéliste, « Il parlait du temple de Son Corps » (Jean 2,19-21).

La signification de tous ces événements, paroles et souvenirs est simple : dès à présent, l’homme lui-même devient le Temple. Pas de temple de pierre, pas d’autel, mais l’homme – son âme, son corps, et sa vie – tout cela est le cœur divin et sacré du monde, son « Saint des saints. » Un temple, Marie – vivante et humaine – est introduit dans un temple fait de pierre, et de l’intérieur, elle lui amène à l’aboutissement de sa signification et importance.

Avec cet événement, la religion, et la vie encore plus, est soumise à un renversement de valeur.

Avec cet événement, la religion, et la vie encore plus, est soumise à un renversement de valeur.

Ce qui entre dans le monde à présent, c’est un enseignement qui ne met rien de plus haut que l’homme, car Dieu Lui-même a pris la forme humaine pour révéler à l’homme sa véritable vocation et signification, à savoir divine. Dès cet instant, l’homme est libre. Plus rien n’est dans son chemin, car le monde entier est pour lui, comme un don de Dieu pour accomplir sa destinée divine.

A partir du moment où la Vierge Marie est entrée dans le « Saint des Saints », la vie elle-même est devenue le Temple. Et lorsque nous célébrons son Entrée dans le Temple, nous célébrons la signification divine de l’homme et la hauteur et la lumière de sa vocation. Ces derniers ne peuvent pas être évacués ou arrachés de la mémoire humaine.

Entrée de la Très Sainte Mère de Dieu au temple
Entrée de la Très Sainte Mère de Dieu au temple